Tombeau (1995), pour support stéréo

Œuvre acousmatique réalisée au département Sonvs du CNSMDL

« … et loin de ses yeux tout à coup, comme un fumée mêlée aux brises ténues, elle s’enfuit dans la direction opposée ; et il eut beau tenter de saisir les ombres, beau vouloir lui parler encore, il ne la vit plus, et le nocher de l’Orcus ne le laissa plus franchir le marais qui le séparait d’elle. » Virgile, Les Géorgiques (Livre Quatrième, Les abeilles)

Tombeau est composée de deux mouvements nettement différenciés. Le premier fait référence à la mort d’Eurydice et à son enfouissement dans les profondeurs du Ténare, accompagnée des pleurs des femmes. Le deuxième mouvement est une métaphore de l’enfer, du feu consumant tous ces êtres que l’on imagine pris dans une danse macabre.

Parallèlement à cette histoire, viennent se greffer des références aux abeilles, au retentissement de l’airain et des cymbales qui les font revenir à leur ruche, à leur fracas dans la bataille, tels qu’ils sont racontés par Virgile dans le Livre IV des Georgiques. Selon la coutume, il faut sacrifier un boeuf à Orphée, déchiré par l’absence d’Eurydice, pour recréer un essaim.

Le matériau est issu de l’objet-radio (mélodie-limite de la bande de fréquences, disparue de nos jours) dans la première partie et de l’objet-tourne-disques dans la deuxième (bruit du disque vinyle lorsque l’aiguille arrive à son bout, à sa limite, et le met en boucle). Il s’agit ainsi d’être attentif au « chant » – métaphore du vide et de l’absence – qui émerge de l’exploration des limites de ces machines, qui sont aussi le témoignage d’une époque révolue. Tombeau a été composée peu de temps après la mort de Pierre Schaeffer.